
Entre l’ère de l’exploitation coloniale et la décision de nationalisation prise après l’indépendance, l’histoire des richesses minières en Algérie s’illustre comme le miroir d’un long combat pour la libération, la souveraineté et le développement. Ce parcours a permis au pays de se transformer, passant d’une terre exploitée à un État maître de son destin, par la reprise du contrôle de ses ressources et la redéfinition de sa trajectoire économique, grâce à des décisions audacieuses et courageuses.
La colonisation française de l’Algérie ne se limitait pas à une simple occupation militaire, mais constituait avant tout un projet économique centré sur le pillage et l’exploitation systématique des ressources du pays, en particulier ses richesses minières, telles que le phosphate, le fer, le zinc et le plomb.
Depuis les mines de fer de Boukhadra et Ouenza (Tébessa), de Breira (Chlef) et de Beni Saf (Ain Témouchent), jusqu’aux mines de plomb et de zinc d’Oued El Keberit (Souk Ahras) et d’Ain Zergua (Tébessa), des milliers de tonnes de matières premières étaient expédiées chaque année vers les ports français, comme le soulignent de nombreux historiens.
La mine de phosphate d’El Kouif (Tébessa), exploitée jusqu’à son épuisement entre 1929 et 1963, illustre la volonté acharnée du colonialisme français d’exploiter les ressources souterraines de l’Algérie.
Les études montrent que la production de différentes matières premières minières dépassait 1,3 million de tonnes en 1913, tandis que le nombre de mines en activité atteignait 40 en 1954, comprenant notamment des mines de fer (13 mines), de plomb, de zinc et de cuivre (6), de sel (5), de phosphate (2), ainsi que des mines de marbre, de barytine, de pyrite, de charbon, de kaolin, de bentonite et d’autres richesses souterraines.
L’exploitation minière en Algérie, qui a débuté avec la découverte des mines de fer et de phosphate à Tébessa, était un pilier de la stratégie industrielle de la France. Bien que la région soit exploitée depuis l’Antiquité, l’extraction intensive a surtout profité à la France, notamment pendant les deux guerres mondiales, sans qu’il y ait de retombées pour le développement local. Dans les années 1950, l’Algérie fournissait plus de 60% du fer et près de la moitié du phosphate nécessaires aux industries françaises.
Pendant cette période, les régions minières de l’Algérie étaient marquées par l’exclusion et la marginalisation, devenant ainsi des bastions de mécontentement populaire, où de nombreux habitants ont rejoint massivement les rangs de la glorieuse Révolution lors de son déclenchement le 1er novembre 1954.
6 mai 1966 – 6 mai 2025 : près de 60 ans de réalisations et de défis relevés
Au lendemain de l’indépendance de l’Algérie en 1962, le secteur minier était encore sous le contrôle des entreprises étrangères, avec 98% de la production destinée à l’exportation, tandis que la main-d’œuvre algérienne représentait un pourcentage réduit de cadres et de techniciens. Les sociétés étrangères avaient abandonné les mines qu’elles avaient exploitées à leur maximum et ne demeuraient actives que dans les sites encore productifs, tels que les mines de phosphate, de zinc, de fer, de barytine, de charbon, ainsi que dans les usines de raffinage du sel.
De plus, le secteur souffrait d’un manque de réserves minérales, en raison d’une insuffisance de recherches et de l’utilisation d’équipements obsolètes.
C’est alors que le président Houari Boumediene, le 6 mai 1966, annonça la nationalisation des mines, déclarant que “l’Algérie s’est réappropriée ses ressources naturelles et sera en mesure de garantir une totale liberté de disposition et d’exploitation de ses richesses”.
La nationalisation concernait 11 grandes sociétés, principalement celles exploitant les mines de fer d’El Ouenza et de Boukhadra (Tébessa), les mines de zinc et de plomb d’Aïn-Barbar (Annaba) et de Sidi Kamber (Constantine), ainsi que des carrières de calcaire dans plusieurs régions.
Cette décision ne se résumait pas à une simple réappropriation de biens, mais était accompagnée d’une stratégie globale de gestion et de développement des mines, avec la création du Bureau algérien de recherches et d’exploitations minières (Barem), qui supervisait les sociétés minières nationalisées.
De la Transition aux Projets d’Avenir
Par la suite, le 11 mai 1967, la Société nationale de recherches et d’exploitations minières (Sonarem) fut fondée.
Durant cette période, l’Algérie a dû faire face à d’importants défis, notamment le retrait des cadres étrangers qui assuraient la gestion des mines.
Malgré ces difficultés, d’énormes efforts ont été réalisés pour garantir la continuité des opérations dans le secteur, avec la formation de milliers de cadres, d’ingénieurs, de techniciens et d’ouvriers qualifiés, le lancement de projets de renouvellement et de modernisation des équipements, ainsi que l’ouverture de nouvelles mines, telles que celles de Beni Saf (Ain Témouchent), Boukaid (Tissemsilt), Kenadsa (Béchar) et Tamzerit (Bejaia).
Cette année, la commémoration de la nationalisation des mines se déroule dans un contexte de nouveaux défis et enjeux. En effet, plusieurs projets miniers structurants sont en cours de réalisation, accompagnés de stratégies ambitieuses visant à opérer un saut qualitatif dans l’exploitation des ressources naturelles et à renforcer la position de l’Algérie sur les marchés mondiaux, tout en garantissant un développement durable pour les générations futures.
Modernisation, Investissements et Développement Durable
Actuellement examiné au Parlement, ce texte vise à améliorer le climat de l’investissement minier en simplifiant les procédures d’accès aux activités de recherche et d’exploitation, en rendant les démarches plus transparentes et en offrant des conditions plus incitatives aux investisseurs, qu’ils soient publics, privés, nationaux ou étrangers.
Ainsi, les richesses minières de l’Algérie sont passées du statut de symbole d’exploitation coloniale à celui de pilier de souveraineté nationale, transformant une source de saignée des ressources du pays en base de croissance et d’industrialisation.
Entre la décision de nationalisation et les défis de valorisation, l’Algérie poursuit avec détermination son chemin vers une exploitation rationnelle et durable de ses richesses.
Dans cette optique, le gouvernement, sous la direction du président de la République, M. Abdelmadjid Tebboune, a lancé plusieurs projets miniers majeurs, tels que la mine de fer de Gara Djebilet à Béchar, en exploitation depuis juillet 2022, le projet de zinc et de plomb à Oued Amizour à Béjaia (34 millions de tonnes de réserves), ainsi que le projet intégré de phosphate à Tébessa, visant à faire de l’Algérie un exportateur clé d’engrais.
A. Ryad