
Le projet de gazoduc transsaharien (TSGP) franchit une nouvelle étape diplomatique et politique. En visite officielle à Alger, le président de la Chambre des représentants du Nigeria, Tajudeen Abbas, a réaffirmé, lundi dernier, la solidité du partenariat stratégique entre Alger et Abuja, tout en soulignant l’importance du projet de gazoduc transsaharien reliant son pays à l’Algérie via le Niger.
Cette déclaration, porteuse d’un message clair sur la détermination du Nigeria à concrétiser ce mégaprojet énergétique, a été faite lors de l’audience que lui a accordée le ministre d’État, ministre des Hydrocarbures et des Mines, Mohamed Arkab, en présence d’une délégation parlementaire nigériane, de Karima Bakir Tafer, secrétaire d’État chargée des Mines, du vice-président de l’Assemblée populaire nationale (APN), Ibrahim Fakhour, ainsi que de l’ambassadeur du Nigeria en Algérie et de plusieurs cadres du ministère.
Le président de la Chambre des représentants nigériane a tenu à souligner les efforts de l’Algérie dans le soutien aux initiatives de coopération africaine, en particulier dans le domaine énergétique. Pour M. Abbas, le TSGP représente “un projet réalisable, d’autant plus qu’il ne traverse que trois pays”, rappelant la viabilité technique et géopolitique d’une infrastructure qui ambitionne de relier les immenses réserves gazières du Nigeria au réseau algérien, et à travers lui, aux marchés européens et méditerranéens.
Le gazoduc transsaharien, long de plus de 4 000 kilomètres, symbolise bien plus qu’un simple corridor énergétique : il incarne une volonté partagée de transformation économique, de souveraineté énergétique et de coopération Sud-Sud. Il s’agit de l’un des projets les plus structurants du continent africain, conçu pour renforcer l’indépendance énergétique du continent tout en stimulant le développement régional à travers les investissements, la formation et le transfert de technologies.
Une relation historique au service d’un avenir commun
Lors de cette rencontre, M. Abbas a exprimé “la fierté de son pays quant aux relations historiques de coopération avec l’Algérie”, insistant sur “la disposition du Nigeria à renforcer la coordination et l’action conjointe afin de concrétiser des projets stratégiques générateurs de bénéfices mutuels, notamment dans des secteurs vitaux”. Cette volonté politique s’inscrit dans une continuité diplomatique de longue date entre les deux puissances africaines, qui partagent une même vision du développement continental fondée sur la solidarité énergétique, la mutualisation des ressources et l’intégration économique régionale. Le communiqué du ministère précise que la rencontre a permis “d’approfondir les concertations et d’échanger les vues sur les perspectives de coopération entre l’Algérie et le Nigeria, notamment dans les domaines des hydrocarbures et des mines”.
Les deux parties ont passé en revue “l’état d’avancement des travaux relatifs à l’étude de faisabilité technique et économique, lancée en mars dernier”, une étape cruciale dans la concrétisation du projet. Ces études permettront de définir avec précision le tracé, les coûts, les mécanismes de financement et les retombées économiques du gazoduc.
Au-delà du volet énergétique, les discussions ont porté sur l’élargissement de la coopération bilatérale à d’autres secteurs stratégiques, notamment la régulation, la formation et l’échange d’expertise technique. L’objectif affiché est de bâtir une coopération durable, inclusive et multidimensionnelle, capable de répondre aux besoins structurels des deux économies tout en renforçant la compétitivité africaine sur les marchés mondiaux.
Défendre les intérêts africains
Les entretiens ont également mis en lumière “l’importance de renforcer la coordination bilatérale dans les enceintes régionales et internationales”, en saluant le niveau déjà remarquable de coopération dans le cadre de l’Organisation africaine des producteurs de pétrole (APPO), du Forum des pays exportateurs de gaz (GECF) et de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP).
Ces forums offrent une tribune stratégique pour défendre les intérêts africains, harmoniser les politiques énergétiques et promouvoir une approche commune face aux défis liés à la transition énergétique, à la sécurité des approvisionnements et à la durabilité des ressources naturelles.
Les deux délégations ont réaffirmé leur “volonté commune de hisser les relations bilatérales à des niveaux supérieurs de partenariat”, à travers des projets concrets et des programmes d’action conjoints favorisant l’intégration économique et le développement durable du continent. Cette approche repose notamment sur la coopération entre les entreprises nationales, à l’image de Sonatrach et de Nigerian National Petroleum Company (NNPC), dont le rôle sera déterminant dans la mise en œuvre du TSGP. Pour l’Algérie, cette coopération s’inscrit pleinement dans une politique énergétique nationale tournée vers le renforcement des partenariats Sud-Sud et la consolidation de la présence de ses acteurs économiques sur la scène africaine. Le ministre Mohamed Arkab a salué à ce titre “la dynamique qui caractérise les relations de l’Algérie avec les pays africains frères dans le cadre de la politique énergétique nationale fondée sur le renforcement des partenariats Sud-Sud et l’élargissement de la présence du groupe Sonatrach sur la scène continentale”.
Un axe au service de l’Afrique
Le projet de gazoduc transsaharien se profile ainsi comme une infrastructure d’unité et de puissance continentale, liant non seulement les économies du Nigeria, du Niger et de l’Algérie, mais aussi leurs destins énergétiques. Plus qu’un projet technique, il s’agit d’un instrument stratégique de souveraineté, d’autonomie et de rayonnement pour l’Afrique, porté par la conviction que le développement du continent doit se faire par et pour les Africains.
L’Algérie et le Nigeria, forts de leur leadership et de leur vision commune, tracent ainsi les contours d’un nouvel ordre énergétique africain, où la coopération, la solidarité et la maîtrise des ressources deviennent les leviers d’un avenir plus stable, plus intégré et plus prospère pour l’ensemble du continent.
G. Salah Eddine