C’est un moment hautement symbolique pour la diplomatie militaire algérienne. En déplacement à Séoul, le ministre délégué auprès du ministre de la Défense nationale, chef d’état-major de l’Armée nationale populaire (ANP), le général d’armée Saïd Chanegriha, a pris part hier à la deuxième journée du Salon international ADEX-2025, l’un des rendez-vous les plus prestigieux du secteur aérospatial et de la défense mondiale, a indiqué un communiqué du ministère de la Défense.
La journée a été marquée par l’ouverture officielle de l’exposition, présidée par le président sud-coréen Lee Jae Myung, témoignant de l’intérêt stratégique que Séoul accorde à ce forum où se croisent technologies de pointe, industries militaires et visions géostratégiques.
En marge de cet événement, le général d’armée Chanegriha a été reçu par son homologue coréen, le général d’armée Jin Young-Seung, chef d’état-major interarmées de la République de Corée.
Selon le communiqué, la rencontre a été consacrée à « l’évaluation de l’état de la coopération militaire bilatérale entre l’Algérie et la République de Corée et à l’examen des différents voies et moyens à même de développer cette coopération, conformément à la volonté affirmée des dirigeants des deux pays ».
Une coopération aux fondations solides
Lors de son allocution, le général d’armée Saïd Chanegriha a tenu à saluer la nomination récente de son homologue coréen, en déclarant : « Je saisis cette occasion pour vous adresser mes plus sincères félicitations à l’occasion de votre nomination à la tête de l’état-major interarmées, en vous souhaitant plein succès dans vos nobles missions .»
Mais au-delà des formules protocolaires, cette rencontre a permis d’ouvrir un véritable chantier stratégique.
« Notre participation à cette exposition, qui constitue un véritable événement mondial dédié aux dernières innovations technologiques dans le domaine de la défense, contribuera sans aucun doute à renforcer les voies de coopération bilatérale, à travers l’exploration des capacités technologiques et industrielles, et l’étude des moyens à même de permettre de renforcer notre système de défense et développer nos capacités militaires », a souligné le chef d’état-major de l’ANP.
Cette déclaration s’inscrit dans une vision globale : faire de la coopération algéro-coréenne un levier de modernisation des capacités de défense nationales. Car si l’Algérie reste historiquement attachée à son partenariat stratégique avec la Russie — pilier de son équipement lourd et aérien —, elle a entrepris, depuis plusieurs années, une politique de diversification de ses fournisseurs.
Une orientation rendue nécessaire par la mutation des menaces sécuritaires, désormais dominées par la guerre hybride, la cybermenace et le terrorisme transnational.
Deux trajectoires complémentaires
Le partenariat militaire entre les deux nations peut bénéficier énormément à chacune d’entre-elles. La Corée du Sud, l’une des armées les plus modernes du monde et acteur émergent de l’industrie militaire mondiale, offre à l’Algérie des opportunités concrètes dans plusieurs domaines. Parmi-eux la formation spécialisée de cadres militaires, la fourniture d’équipements adaptés aux opérations asymétriques et, surtout, la coopération technologique et aérospatiale.
En effet, Séoul est aujourd’hui l’un des rares pays capables de concevoir et fabriquer des satellites d’observation et de communication de haute précision, un domaine dans lequel l’Algérie cherche à consolider sa souveraineté stratégique.
De son côté, Alger peut mettre à profit son expérience accumulée dans la lutte contre le terrorisme et la subversion, une expertise qui lui a valu d’être sollicitée comme référence par de nombreux pays confrontés à ce fléau. Ainsi, la complémentarité entre les deux nations dépasse le cadre purement militaire pour s’étendre à la sécurité globale et technologique, champ d’action désormais incontournable pour les puissances émergentes.
Une convergence de volontés stratégiques
Lors de son intervention, le général d’armée sud-coréen, Jin Young-Seung a souligné la portée de cette coopération en déclarant :
« La volonté des deux parties de jeter les bases d’une coopération militaire prometteuse, à la hauteur du partenariat stratégique liant les deux pays, à travers l’ouverture de perspectives de coopération plus larges à l’avenir. »
Cette affirmation marque une étape fondatrice. Elle traduit la volonté de Séoul et d’Alger de faire de leur partenariat un modèle de coopération Sud-Sud fondée sur la technologie, la souveraineté et la stabilité régionale.
L’Algérie, qui s’impose de plus en plus comme un acteur de stabilité en Afrique du Nord et au Sahel, investit dans des alliances équilibrées et pragmatiques.
Ce rapprochement avec la Corée du Sud s’inscrit dans cette logique : bâtir une coopération de défense ouverte, technique et tournée vers l’avenir, tout en préservant l’indépendance stratégique du pays.
G. Salah Eddine
